Chant des Bardes
Le Chant des Bardes est un événement culturel majeur, né à Mirras (capitale de la Tveitania) et organisé chaque année depuis l'an 1191 PS. Il se tient généralement à Mirras, mais certaines éditions se déroulèrent dans d'autre villes. Le Chant des Bardes propose à certains artistes, poètes, chanteurs et autres bardes mais aussi des voyageurs ayant parcouru le monde, d'apporter leurs témoignages : leurs récits, poèmes et chants sont ainsi clamés devant une population toujours enthousiaste. En voici quelques extraits :
« J’étais marchand autrefois, mes affaires prospéraient,
Mes clients m'appelaient "l'homme aux mains pleines et dorées".
A la vue de ma caravane, on se réjouissait,
Les hommes buvaient, les femmes dansaient, les enfants chantaient.
Ayant chevauché sur tout l'ensemble du désert,
Je fendis les flots et tournai le dos à la terre.
J'ai rencontré, sur une île au-delà de la mer,
Le peuple dont les devins écoutent le cri des pierres.
D'étranges archipels sur mon bateau j'ai atteint,
Où le soleil et la lune, dansent au matin.
Je suis devenu prince, dans un pays lointain,
Qui couvre tous ses arbres et fleurs de blanc satin.
Vinrent les jours obscurs, où je fus chassé du monde,
Bandit de haute mer, menant une vie vagabonde,
Capitaine pirate sans relâche sillonnant l'onde,
Et creusant son chemin, partout où le tonnerre gronde.
Mon navire s'échoua, par une nuit de printemps,
Me condamnant à vivre ici, en tant que mendiant.
Me voilà enfin poète, chantant ma vie d'avant,
Désormais seule ma voix, sera portée par les vents. »
Scarvione, lors du Chant des Bardes de l’an 1 199 Post Scriveirmen, à Mirras
"Le vent complice"
"Ah ma douce amie, comme vous me damnâtes !
Quel fol émoi s'empara de mon être !
Vous m'avez légué ce teint écarlate,
Quand de ce blanc lin jaillit votre chair.
Votre peau échappée hors du giron,
Embrasa mes yeux, inspira mon luth.
Mon cœur est pur, je ne suis pas fripon,
Pourtant cet instant, madame, vous m'émûtes."
Extrait de "Les élans enflammés de mon cœur" par Fanfrelin des Galoupes,
lors du Chant des Bardes de l’an 1 196 Post Scriveirmen, à Mirras
On parle de Rodomon Bokadezajaini et Aldebert Vosisurazar, deux frères ayant régné sur le peuple Gnome, bien avant l’époque des Archimages. Leur longévité, ainsi que leurs incessantes chamailleries, qui semblent encore résonner dans les murs de l’antique cité de Dezaruka, traversèrent les âges jusqu’à mes oreilles, quoique je soupçonne une pointe d’exagération propre à ce chaleureux peuple… Je revois encore la délectation dans les yeux de mon hôte Canzalle Fagavalibata, lorsqu’elle me narrait les nombreuses légendes que ses aïeux lui avaient transmises. De son fort accent, de ses gloussements, ses arrière-petits-enfants et moi-même partagions l’enthousiasme.
« N’ayant point vécu ni vu, si d’eux ceci ne sais : Rodomon gnome, roi et frère de l’autre, ainsi Aldebert roi gnome et frère de l’un. Jamais ne savent, qui de l’un l’autre était l’aîné. Aussi loin m’en souvient-il, ils eurent à quereller. Plus encore en l’époque, querelles au pouvoir gnome se devait. Et le roi Junavari de les en remercier. Assurément, jamais gnomique oreille n’entendit plus grand ménage. Au roi un successeur devait être, et parmi notables gnomes peu s’y virent. Qu’en était, qu’en fut, Aldebert on désigna, qu’ainsi soutenait l’assemblée. De pouvoir nanti, partit en conquête.
Or le Rodomon, son frère jalousant, de se proclamer souverain. L’Aldebert revenu fut peu aise à son frère nouveau roi. Sujets ravis, royaume prospéra Rodomon d’avoir, mais l’ancien à nouveau roi réussir : épopées et récits charmant notre gnomique peuple. Lors le Rodomon aussi de partir en conquête, et le retour de seigneur il fit.
Une vie sans pouvoir tout narrer, mais le plus étonnant de demeurer : il arriva que l’autre comme l’un des siècles continuèrent. A Rodomon qui esprit montrait, la bravoure l’Aldebert de préférer. Si Aldebert de composer théories et de poèmes, le Rodomon y guerroyer de victoires. Tant en fut que ces querelles au jugement d’assemblée de finir, et de quelqu’ailleurs un seigneur nouveau arriva. Les deux gnomes frères jamais en accord ne tombant, de lassitude l’assemblée en prison les y mirent. L’on dit que tous autres en folie de tomber, car de loin non, les querelles ne pouvaient en finir. »
Théodraste, lors du Chant des Bardes de l’an 1 194 Post Scriveirmen, à Mirras
« Aux confins de la Mer de Maddiao, sur Kiiuya, une île de Pardalie que les hommes de là-bas nomment Qualuyas, vivent les Asadeba à la peau noire. On raconte qu’ils communiquent avec les Dragons, et qu’ils ont les mêmes ancêtres.
Ce peuple croit que le monde est issu d’une créature mythique appelée Belira Gamato, la « Mère-Tortue », née d’une écaille de Wo Majiri, « le Dragon Primordial », éternel et endormi. Elle ne faisait que manger, et grossir. Elle finit par manger toutes les plantes et tous les poissons, et à tellement grossir qu’elle devint incapable de bouger, et mourut. De sa carapace naquit la terre, de ses pattes les îles, et de sa sueur la mer.
Une autre de leurs légendes dit qu’une fois l’an, un Dragon de Mer jaillit près d’un village Asadeba avec dans sa gueule un Janiru, sorte de poisson géant vivant dans les eaux de la Maddiao. Il le dépose sur la plage et les habitants, fort honorés de ce présent, cuisent celui-ci pendant une nuit entière dans un four consacré à cet usage, en l’assaisonnant généreusement de Kosamé, le cumin qu’ils cultivent. Au matin suivant, tous les habitants partagent le Janiru Kosamé avec le Dragon qui les bénit alors, leur promettant une pêche heureuse pendant 7 ans. Ces hommes affirment que leur Kosamé possède des vertus digestives sans pareilles, et que les Dragons, ne pouvant consommer celui-ci que de cette façon, sont heureux de partager ainsi leurs repas. »
Mandrèle, lors du Chant des Bardes de l’an 1 197 Post Scriveirmen, à Mirras
« Entends la complainte, Liannaé rivière sacrée,
De l’humble poète, qui alors se promenait,
N’attendant de ce jour, que tes eaux admirer,
Vaquant au travers du petit bois ombragé.
D’entre les arbres, sa silhouette émergea,
M’invitant du regard, me guidant de ses pas.
Je fus changé en pantin, le monde s’arrêta,
Ses yeux posés sur moi, seul mon cœur s’affola.
Je me perdis en cherchant à la retrouver,
Comme je m’approchais, alors elle disparaissait,
Je compris alors la funeste vérité,
Je n’étais pas des siens, le haut peuple des fées.
Guéris-moi de tes flots, ô divine Liannaé,
Maudit soit son regard, lui qui m’a tant damné,
Fasse que jusqu’à son image soit oubliée,
Pour que mon pauvre esprit soit enfin libéré. »
Izelune, lors du Chant des Bardes de l’an 1197 Post Scriveirmen, à Mirras
« Depuis ma verte contrée, tant de lieues j’ai parcouru.
Entendez ma voix conter, et emporter par les rues,
D’une inspiration profonde, ce que nul œil ne verra,
Je chante les Vents du monde, au peuple de Tveitania.
Celui qui doit naviguer, sur les eaux de l’Eresthé,
Doit rendre hommage et prier, sous peine d’être naufragé,
Au père de tous les poissons, le bienveillant ‘Assérion’,
Lui qui guida les Colons, vers une nouvelle maison.
Parmi les îles de Guirlotte, toujours chaud mais parfois rude,
Majestueusement il flotte, le fameux ‘Vente dé siud’.
Les habitants de la côte, le surnomment ‘Ventedesse’,
Et bien souvent chez ces hôtes, il apporte grande liesse.
Au nord de la Nozovie, dans la steppe d’Aza’Than,
De la frontière il se rit, ce vent naissant au Svedran.
Toujours il souffle sa haine, le maudit ‘Aza’Radag’,
Balayant les froides plaines, de ses terrifiantes vagues.
Au centre du sombre empire, se déchaîne ‘Aethanur’,
Qui fait entendre son ire, d’un affreux sifflement sourd.
Il tiendrait aussi son nom, le souffle de la vipère,
De ces vapeurs de poison, dont il imprègne la terre.
Sur le détroit de Bédalle, vit le perfide ‘Trion’,
Qui s’ébroue en mille rafales, contre l’île portant son nom.
Osez donc le traverser, pour rejoindre l’autre rive,
Vous finirez renversés, agrippés à une solive.
Dans la plaine des Colons, retentit un hideux chant,
Nommé par la tradition, tout simplement le ‘Hurlant’.
Le berger qui mène à paître, à cet effroyable son,
Il tremble de tout son être, et rentre ses blancs moutons.
Le ‘Thurvind’ sec et cinglant, blanchit le désert sauvage,
Il rend Vildemarken blanc, jusqu’aux nordiques rivages.
De la côte à la forêt, nul ne brave ces terres gelées,
Même les fous ne vont errer, quand il se met à souffler.
Sur la mer de Yende dansent, les vents jumeaux opposés,
‘Bladvind’ nommé par les Ases, par le Khormand ‘Thayazieh’.
De la côte il est le roi, croisant son frère déchaîné,
‘Fjervind’ le fuyant vent froid, aussi ‘Laïakhéb’ nommé.
Sur le haut plateau du Zah, et son perpétuel été,
Retentit le grand fracas, de l’aride ‘Rokekébhé’.
L’oiseau Roc, disent les anciens, ce géant seigneur du ciel,
Le crée à partir de rien, d’un battement de ses ailes.
Pays du peuple nomade, et ses dunes ensablées,
L’immense désert de Garradhe, est le fief du ‘Sorazieh’.
Ses bourrasques sont soudaines, seule la prière reste à ceux,
Touchés par l’ardente haleine, un souffle de sable et feu.
Au centre du blanc Kraag-Rasch, dans la plaine de Nerùred,
Aucune place pour les lâches, pas une voix n’appelle à l’aide.
Le seul être qui prend fuite, jusqu’aux montagnes sans âge,
Est le sournois ‘Virùtit’, le vent des oiseaux sauvages.
Dans la Passe de Jahyondo, comme en un étranglement,
Le seigneur de cet étau, se nomme ‘Tarquis’ le vent lent.
Comme des vagues sans la mer, il soulève dans son sillon,
Des nuages de poussière, couvrant jusqu’à l’horizon.
Voici le vent qui rend sot, et qui vous immobilise,
Soudain derrière votre dos, il y a ces voix qui vous disent :
Fini le temps des fredaines, en voici un qui a bu,
Ou bien de façon certaine, a entendu le ‘Pétru’ ! »
Cossidée, lors du Chant des Bardes de l’an 1199 Post Scriveirmen, à Mirras
Par-delà la grande et vaste Forêt (version Tveita)
Il était une fois quatre amis : un Chat, un Loup, un Ours et un Dragon. Ils vivaient dans un village, près de la grande et vaste Forêt. Dans la grande et vaste Forêt vivaient des Humains. Beaucoup d’Humains. Les Humains n’étaient pas comme les autres Animaux, ils ne savaient pas à quel point la Nature était belle. Ils étaient bêtes et cruels.
Les quatre amis voulaient partir loin, par-delà la grande et vaste Forêt, pour vivre en haut dans les Montagnes. Mais ils avaient peur des Humains. Comment pourraient-ils parvenir de l’autre côté ?
Ils auraient pu la traverser en marchant, lentement et silencieusement, mais le Loup dit : « Ils me haïssent, si nous en rencontrons un, il me tuera. »
Ils auraient pu courir, mais l’Ours dit : « Je suis trop lourd, et les humains me rattraperaient. »
Ils auraient pu contourner la grande et vaste Forêt, mais la Forêt était grande et vaste, et le Chat dit : « Cela prendrait plusieurs années pour la contourner, je suis trop petit. »
Ils auraient pu voler sur le dos du Dragon, mais il dit : « Cela serait difficile pour moi de voler avec vous tous sur mon dos : je respirerais fort et je brûlerais les Arbres. Et nous devons rester ensemble. »
Soudain le Chat eut une idée : « Je sais ce que nous allons faire. Je vais dire aux Humains qu’il y a beaucoup d’or en haut dans les Montagnes, et les Animaux n’ont pas besoin d’or. Ils quitteront la grande et vaste Forêt, et nous pourront la traverser. »
Ainsi fit le Chat, et ainsi firent les Humains.
Les quatre amis marchèrent à travers la grande et vaste Forêt. La grande et vaste Forêt était si merveilleuse qu’ils en tombèrent amoureux. Ils décidèrent de rester ici et de vivre dans la grande et vaste Forêt.
Et le Loup déclara : « Peut-être qu’un jour quelques Humains essaieront de traverser la grande et vaste Forêt et auront peur de nous… »
Version Tveita d’un conte traditionnel d’Asamarken, présenté par Jundale lors du Chant des Bardes de l’an 1196 Post Scriveirmen à Mirras
Utover den sterun okk bredun Skog
Det vadade et geng, far vanar : et Katt, et Skarn, et Mar okk et Drek. The livsadear inn et eby, nær den sterun okk bredun Skog. Inn den sterun okk bredun Skog livsadear Manor. Myk Manor. Dear Manor vadadear ikk sem antar Jurar, the ikk veitadear hur snug vadade Norell. The vadadear dumar okk grymar.
Dear far vanar viladear kja fjerthy, utover den sterun okk bredun Skog, okk livsa opp inn den Jœv. Men the vadear frykladar a dear Manor. Hur skade the ovkom til den antan sid ?
The skade vanga genum den, avtethy okk kjæfathy, men de Skarn seade : « The hataar minus, om vith hittanar et a sinar, henn ska dodera minus. »
The skade lœpa, men de Mar seade : « Ej vadan tæv tong, okk dear Manor skade fæng minus. »
The ska go kring den sterun okk bredun Skog, men de Skog vadade ster okk bred, okk de Katt seade : « De skade tida æror fœr kome kring den, ej vadan tæv liten. »
The skade flige ov den ryg av den Drek, men henn seade : « Ditte skade vada unlett til minus, fœr flige mid alle a nith ov mit ryg : ej skade anda starkthy okk ej skade brenne dear Treor. Okk vith mastanar væja saman. »
Ænug de Katt hade et sæs. « Ej veitan vad vith ska ga. Ej ska sea til dear Manor a ditte vada myk gyld opp inn fjel, okk jurar ikk trenksadear gyld. The ska kja ut den sterun okk bredun Skog, okk vith ska kana go genum den. »
So gade de Katt, okk so gadear dear Manor.
Dear far vanar vangade genum den sterun okk bredun Skog. De ster okk bred Skog vada so myk undranig, an dear far vanar bledear astladar ad den. The akfedadear a væja, der okk livsa inn den sterun okk bredun Skog.
Okk de Skarn kunjœre de : « Kankje et dak nokra Manor ska rejna a go genum den sterun okk bredun Skog, okk ble frykladar a minar... »
Version originale d’un conte traditionnel d’Asamarken, présenté par Jundale lors du Chant des Bardes de l’an 1196 Post Scriveirmen à Mirras
« A quoi rime une plume qui ne sait plus voler ?
Plus d’ailes dans la brume, elles se sont étiolées.
Si rien ne la parfume, elle devient désolée,
Et enfin se consume, sur ce gris mausolée.
Quel acte ai-je donc commis, quelle faute dois-je expier ?
Mon lyrique semis, encore foulé au pied,
Pour mon cœur seul permis, se voir éparpiller,
Aucun espoir hormis, celui de ce papier.
A quoi rime une plume, quand elle perd ses ailes ?
A forger sur l’enclume, de vaines ritournelles.
Ces paroles que j’exhume, pensant les rendre belles,
Sont lourdes d’amertume, sous leur vernis de miel.
Quelle destinée attend le poète aux mille maux ?
Se perdre dans le sang, de sa voix suivre l’écho ?
Redevenir enfant, ou se jeter à l’eau ?
Il faudra bien du temps, car je n’ai plus les mots. »
Izelune, lors du Chant des Bardes de l’an 1195 Post Scriveirmen, à Vîn-Denna-s